Au seuil de l'année, il est coutume de faire le bilan du parcours de tout un chacun. Journaux, magazines, télévisions... l'usage semble incontournable dans la doxa. L'État, la corporation, l'individu... personne n'y échapperait. Ce genre de consensualité toute entendue soulève chez moi un sourcil dubitatif. Déjà, il serait intéressant d'interroger la portée de cette "pratique".
À qui profite-t-elle socialement? À quels aménagements laisse-t-elle place chez l'individu et dans la collectivité? Y est-il vraiment question d'introspection? Est-ce un moyen de réorganiser les séquences narratives discordantes afin de subsumer la confrontation à soi-même aux trames lisses et acceptables d'une authenticité revisitée? Ou est-ce plus simplement l'occasion irréfléchie de satisfaire une pulsion naturelle, un besoin appelant à la purge?
Depuis le 18 décembre en France, une nouvelle arme est disponible aux justiciers liminaires s'aventurant sur l'Avenue de la Vengeance au crépuscule de 2009. En quelque cliques et pour la modique somme de 8€50, il est possible de "rendre justice" en envoyant 100g de bon fumier provenant des meilleurs élevages bovins de Franche-comté à ceux qui vous ont fait chier au cours de l'année! (frais de porc et de manutention inclus sur toute la France métropolitaine)
L'affaire est réglée en quelques minutes sur fumier.com. Le fruit de votre introspection se matérialiserait alors dans le courrier sous la forme d'une jolie boîte à fumier sur laquelle figure une vache affublée d'une cape de super-héros. Le tout est accompagné d'un message personnalisé. Rigueur éthique oblige, aucun envoi n'est anonyme et les messages «méchants» sont censurés puisque l'objectif serait avant tout humoristique...
Selon son concepteur - un agriculteur du Jura - l'entreprise est florissante et le site génère plus de 5000 connexions par jour. Les parisiens seraient particulièrement friands de ce geste "100% bio" puisqu'ils constituent 60 à 70 % de la clientelle bénéficiant de tout l'amour et le savoir-faire de Roger Combotte, "roi du fumier".
Vive la France, vive la justice (?) et merde alors!
3 commentaires:
"Qui a vaincu à Waterloo ?... C'est un mot ! Un mot qui fracture la poitrine, une insulte à la foudre ! Le plus beau mot qu'un français ait répété ! Dire ce mot et mourir ensuite quoi de plus grand ? C'est foudroyer le tonnerre!"
Victor Hugo (Les Misérables - 1862)
non mais... quelle année de merde! ;-)
Monsieur Combotte devrait tout de même garder son fumier top-qualité pour l'agriculture et proposer le pire pour la correspondance... de toute façon, qui, vraiment, y verrait une différence?
Bonne année !
"Le sage ne peut rien souhaiter sur terre, sinon de rendre un jour le mal qu'on lui a fait"
(Jean-Paul Sartre)
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