Voilà quelque temps que je traîne une toux fugace, mais caustique. J'ai beau lui avoir déclaré la guerre, rien n'y fait vraiment. Elle me poursuit et me surprend de la bouche de ses canons. Comme cette armée de virus se propage en général avec son régiment de paladins "propulsé par pont aérien, mon général", toux et éternuements deviennent suspects. Ainsi, telle une main louche à la table de jeux, mes quintes s'accompagnent du regard torve des quidams méfiants. Il faudrait tout stériliser derrière moi, me confiner à mes quartiers, me bannir des lieux publics, me sortir du jeu.
La peste de celui qui porte ce trait de saison car, en réalité, il pourrait être l'hôte du seul et unique virus digne de mention. Zevirus. Vous savez, celui dont l'économie a déjà triomphé à grands coups de baptême hors de l'église porcine: le tristement re-nommé A H1N1. Les symptômes (qui peuvent durer jusqu'à une semaine) sont similaires à ceux de la grippe saisonnière, et peuvent aussi inclure fièvre, mal de gorge, maux de tête et douleurs musculaires et articulaires... Bref, il est presque trop aisé de confondre le virus vulgaris et zevirus.
Sur les ondes, les médias me disent tout et rien. De l'assertorique à l'apodictique, ils médisent, médiatisent. Ils me bombardent de petites capsules que j'avale sans posologie. Sous le parapluie du double principe de la publi-cité, leur prolixité est assommante. D'un côté, si le public en demande c'est qu'il faut lui en donner. (L'auditoire c'est bon pour le savon, ça fait vendre.) De l'autre côté, il est d'intérêt public de diffuser certains faits et le 4e pouvoir doit informer son auditoire au nom du bien commun. (L'information c'est bon pour le réseau, ça lave plus blanc que blanc.) Au final, puisque les sceptiques doivent être confondus...
Après le Lupin costar-cravate des hautes sphères de la finance, zevirus devient l'ennemi public numero uno. C'est bon pour l'Économie d'oublier la crise, l'hypothèque, le chômage et la chute sociale. C'est bon pour l'État d'oublier la dette, les promesses et les scandales. C'est bon pour le Peuple de se sentir lié et à égalité devant un mal qui, pour une fois, vient de l'extérieur. "La mort nous guette tous, elle ruse, elle est partout!"
Si les médias s'en donnent à coeur joie, les millénaristes, les moralistes et les scientifiques ne sont pas en reste. Bientôt, le philosophe et le dévot nous dirons que de deux choses l'une: ou Orwell avait vu juste et les animaux ont commencé la révolution (après la fièvre bovine et la grippe aviaire voilà que le cochon prend les armes), ou l'homme mené par ses instincts les plus bas voit son âme contaminer sa chair.
À tout prendre, je me demande si ce n'est pas cette cacophonie dantesque qui me rend malade.
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